Shining - Stephen King
02/10/2017
Jack Torrance, ancien alcoolo viré de son poste de prof pour violences, n'a pas d'autre choix s'il veut subvenir aux besoins de sa famille que d'accepter le poste de gardien à l'Overlook Palace (un hôtel de luxe situé au milieu de nulle part dans les Rocheuses) que son meilleur ami lui a trouvé. Durant les longs mois d'hiver, le palace est fermé, vidé de son personnel, seul reste le gardien et sa famille. Jack voit aussi, là, l'occasion de finir d'écrire cette fameuse pièce de théâtre synonyme de succès et nouveau départ.
Wendy, sa femme, n'est pas très à l'aise avec l'idée de se retrouver bloquée là haut pendant l'hiver mais s'y résigne car c'est la dernière chance de sauver son couple.
Danny, leur fils de 5 ans, petit garçon spécial et sensible, a conscience des enjeux mais ses cauchemars se font de plus en plus réels et ici, quelque part, quelqu'un lui en veut...
Ma connaissance de King s'arrête à Ça (roman, 1ère et dernière adaptation) et à quelques autres films adaptés de ses romans. Notre prochain book club portant sur le thème de la peur, un titre de cet auteur reconnu pour avoir filé les chocottes à des millions de lecteurs a été proposé parmi d'autres : Shining!
J'ai sauté sur l'occasion de renouer avec the King, à pieds joints... Mal m'en a pris? Que nenni! Enfin...
Des fois je me dis que je suis quand même un peu tordue, pourquoi ce besoin d'aller chercher la peur même dans les livres?
(C'est comme là hein, la nuit est tombée, il fait noir total chez moi et je m'apprête à revivre les heures les plus trippantes de cette lecture!... Ôô Lumos bordel! ^^ )
Bref.
Donc je me lance. Forcément le visage fou de Nickolson me trotte dans la tête (et pourtant je n'ai pas vu le film, mais qui n'a pas vu cette célèbre affiche et qui n'a pas eu quelques échos de l'histoire hein?), j'ai un peu peur que ma, plus ou moins, connaissance de l'histoire ne vienne gâcher l'effet Fear de l'histoire et que mon trouillomètre n'implose pas. Je me berce encore de cette douce illusion...
King pose les bases de son histoire tranquillement, sans se presser, en lâchant quelques petites infos en mode flashback sur la family , histoire que le lecteur ait toutes les données d'analyse de la situation en main.
Jack Torrance, le père, ex-alcoolo, écrivain "raté", prof promis à une excellente carrière que sa propension à la violence a gâchée. La conscience tout sauf tranquille et un tantinet nerveux le pépère.
Wendy, la mère, un brin sur le qui-vive, rapport à l'alcoolisme du mari et ses pétages de plomb mais aussi un peu jalouse de la relation père/fils malgré et surtout à cause de ce qui s'est passé entre eux. Un peu flippée aussi par/pour son fiston et inquiète de leur relation rapport à son passif avec sa propre mère.
Le fiston justement. Danny. 5 ans (toutes ses dents), affublé d'un ami imaginaire et de quelques particularités psychiques comme on aimerait en avoir (les cauchemars en moins, kof kof).
Et voilà nos gais lurons (en vrai, ça respire pas la grande joie dans cette famille) partis pour un "petit" séjour hivernal à l'Overlook Palace (mazette!), un hôtel de luxe datant de 1907 perdu en pleine montagne (mais bon le spot est so beautiful!). C'est que papa a dégotté le job idéal pour repartir à zéro et relancer sa carrière d'auteur : concierge (la définition wikipédia correspond au descriptif de l'emploi).
Nouvellement promu gardien, Jack se sent revigoré et plein d'entrain (aaah l'air pur de la montagne!) malgré que maman ne soit pas trop rassurée. Quant à ptit Danny, ben comme c'est un chouette gamin, il sent bien que c'est important pour daddy ce travail (genre la dernière chance de sa life), alors il met ses peurs en sourdine et il se colle un grand sourire sur le visage (d'toute façon, c'est pas comme s'il avait le choix).
Avant de se retrouver vraiment tout seuls, on notera la gentillesse du cuistot qui copine avec le gosse (on est un peu pareil tous les deux t'sais) et surtout, surtout lui dit bien : "n'entre jamais, jamais, JAMAIS dans la chambre 217! Moi ça m'a traumatisé..." (Ambiance, ambiance, youhou).
Ensuite, tout le monde se fait la malle laissant la famille Torrance maîtresse des lieux pour l'hiver. Maîtresse des lieux ou sous le joug de ce qui est là? (hin hin...). En tout cas libre de vivre une expérience de dingue!
Bien je me suis un peu lâchée façon dérision dans ma présentation de l'histoire et des personnages principaux mais sachez qu'être dans la tête de Danny pendant une bonne centaine de pages m'a grave fait monter la pression. C'est rare que je me retrouve quasi en apnée, raide comme un piquet et avec une terrible sensation d'oppression pendant ma lecture, ici ce fut le cas pendant les trois quarts du roman.
Ah ça il n'y a pas de doute, Stephen King maîtrise à la perfection les ressorts de la peur et, ce que ressent Danny, son angoisse qui va crescendo, vous gagne littéralement et vous prend bien bien aux tripes.
L'anxiété latente de la mère ainsi que la montée en puissance de la folie du père sont très bien exploitées et font que l'ambiance déjà bien glauque devient aussi glaçante que les congères qui entourent l'hôtel.
Le tout fait office de bombe à retardement, on serre les fesses pour ne pas exploser et partir en courant avant la fin, histoire de vivre pleinement et à bout de nerfs la conclusion de ce méga trip horrifique. Et moi, c'est là, au moment du déchaînement des éléments, au paroxysme de la violence, que j'ai lâché la pression. Cela restait prenant mais le ballon de la peur gonflé à bloc s'est vidé (pfuiiiit bye bye). Un peu comme Danny d'ailleurs, et la mère aussi tiens, qui affrontent elleux aussi leurs peurs à ce moment-là. Allez cette menace enfin identifiée restait plus qu'à lui faire sa fête et ciao!
Et c'est là que je me dis que ce qui fonctionne bien avec moi c'est l'attente, cette fichue attente pendant laquelle tu suspends ton souffle et tu cogites un max tant que le couperet n'est pas tombé. La peur de ce qui menace est alors plus effrayante encore que la menace elle-même. Et Stephen King ça, il le sait, le cochon! Mais avouons-le nous, quelque part, c'est ce qui est bon.
Et puis j'aime les portraits que brosse cet auteur, les gosses ont toujours un capital sympathie fort en plus d'être intéressants et les adultes sont complexes. Il est toujours question aussi dans les romans de Stephen King de dresser une certaine peinture sociale. C'est quelque chose que j'avais déjà fortement ressenti dans Ça et, ici, on n'y échappe pas avec ce qu'il donne à voir de cette famille en pleine désintégration.
J'ai maintenant très envie de voir l'adaptation de Kubrick, un grand classique du cinéma, que pourtant le maître de l'horreur a moyennement appréciée.
"La vie est dure, Danny. Le monde ne nous veut pas de mal, mais il ne nous veut pas de bien non plus. Il se fiche de ce qui nous arrive."
"Les larmes qui brûlent sont aussi celles qui consolent."
"Dans les familles comme il faut, les bras des enfants ne pendaient pas de cette manière-là."
"Aujourd'hui il faisait gris et dès avant midi le ciel avait commencé à cracher de la neige. La radio, qui prédisait vingt à trente centimètres de neige de plus, n'arrêtait pas d'encenser la déesse Précipitation, bénédiction des skieurs du Colorado. Assise dans sa chambre, Wendy tricotait une écharpe tout en se disant rageusement qu'elle savait exactement où les skieurs pouvaient se foutre tout cette neige."
"La peur l'avait envahi comme une moisissure qui se serait fixée dans les cavités obscures de son corps et que seul un rayon de soleil parviendrait à faire disparaître."
18 commentaires
Superbe chronique C'era! Je suis content de voir que tu as trouvé l'inspiration pour l'écrire et regrette que tu ne le renouvelles pas à chaque lecture!
Tu es indulgent Nicolas mais tes mots font plaisir à lire et sont un encouragement à écrire des avis de manière plus régulière. Je me dégage du temps pour ça! :)
Jamais lu le livre, le film m'avait assez effrayé.
Et bien je viens de voir le film et je l'ai trouvé mauvais (ou bien il a mal vieilli). Je n'y ai pas retrouvé l'intensité du roman, ni son intelligence dans le propos sous jacent. La mère est totalement cruche dans le film et le gamin ne m'a rien fait ressentir (c'est quoi cette histoire de faire parler son doigt pour évoquer Tony son ami imaginaire? risible).
Le jeu de Nicholson sauve un peu la mise mais c'est tout...
Je comprends mieux que S.King ait pu être déçu.
Je ne saurais que trop te conseiller de lire le roman pour vraiment te faire une idée du contenu de cette histoire.
Je n'ai pas voulu lire le livre car la version cinématographique avec Nicholson m'avait vraiment marqué, et m'avait foutu les chocottes, quelque chose de bien ! J'ai préféré rester sur ce souvenir. Ton avis quand tu auras vu le film sera intéressant d'ailleurs pour comparer.
Si ça peut te rassurer ! je me demande aussi souvent pourquoi j'aime bien me mettre la chair de poule ! Mais j'ai arrêté ... pas de réponse ! sauf que c'est un vrai stimulant émotionnel et que j'aime ressentir plein de choses différentes ! en vieillissant ça me passe un peu !
bises ma C'era !
Comme je le dis à Alex ci-dessus, je viens de voir l'adaptation et c'est une grosse déception. Je l'ai trouvée vraiment mauvaise par rapport au livre. Elle n'exploite pas les 3/4 de ce qui fait l'intérêt du roman et ne m'a pas effrayée du tout. J'ai même failli m'endormir... :p
Franchement, si un jour tu en as l'occasion, tente le roman, il vaut 1000 fois cette ridicule adaptation.
Peut-être que c'est une façon d'apprivoiser nos peurs que de nous y confronter de diverses manières ^^ Cela me paraît être une bonne réponse :p Et je valide le "vrai stimulant émotionnel".
moi ça ne me passe pas du tout (au contraire :p )
bisou Lili
J'ai vu l'adaptation de Kubrick, mais je n'ai jamais lu le livre. J'aimerai bien le lire, mais j'appréhende parce que je suis tellement imprégné du film.... *Anne*
Très honnêtement de mon point de vue, le livre est bien meilleur. Bien plus profond, plus complet, plus vaste et plus intéressant que cette adaptation qui personnellement m'a bien déçue.
Je t'invite, Anne, à le lire parce que sinon ce serait passé à côté de l'essence même de cette histoire de King.
on est des toqué pour adorer ce fiche la trouille!! mais on a l'air de bien assumer donc .. ce livre me fait de l'œil a chaque fois que je vais en librairie mais je l'ai pas encore pris. En plus j'ai pas vu le film. Ton histoire de la chambre 217 me rappelle l'histoire de la chambre 2048 avec avec Samuel L. Jackson et john cusack si mes souvenirs sont bon. Qui est d'ailleurs une nouvelle de king bise c'era
Il doit y avoir un peu de ça Chris c'est sûr :p
Privilégie le livre au film, stp, tu n'en seras pas déçue.
Je me souviens très bien de ce film avec Cusak, un vrai huis clos de malade! Je crois l'avoir vu 2 ou 3 fois. Et merci pour l'info quant au fait qu'il s'agit d'une nouvelle de King, ça explique pas mal de choses ^^
(la chambre 217 a son importance dans Shining mais le livre ne se limite pas qu'à elle ^^ D'ailleurs dans le film ça devient la chambre 237)
Merci Chris de ton passage par ici :)
chambre 1408 pardon, me suis trompé
:) c'est marrant dans mon souvenir, c'était une chambre à 3 chiffres seulement. Comme quoi ^^
En tout cas, un bon film d'épouvante. Merci pour le rappel :)
J'adore ce classique du genre fantastique :)
J'ai cru comprendre que tu appréciais l'auteur oui :) Tu as vu Ça alors depuis mon com sur ton blog?
Hé hé, j'ai bu du petit lait avec ton billet ! J'aime ta dérision du début, un bon moyen d'ouvrir la soupape ;-)
Puis-je ajouter que je suis sur la même longueur d'ondes que toi ? L'attente qui fait monter l'angoisse est aussi ce que je préfère, et c'est d'ailleurs ce que je vis actuellement, en apnée totale avec "Ça" (les grands esprits se rencontrent, tiens !) ^_^
Pour répondre à ce besoin que nous avons de nous faire peur, j'ai trouvé une réponse dans un entretien de Daryl Gregory" qui disait : "Faire face à la terreur et en ressortir vivant est une sensation grisante." Et j'avoue que cette analyse me va plutôt bien ;-)
C'est vrai que j'aime aussi beaucoup l'intelligence avec laquelle le King représente les enfants.
À la fin de celui-ci, je me suis demandée ce que deviendrait le petit Danny, une fois adulte, après une telle expérience traumatisante. J'ai trouvé la réponse dans "Docteur Sleep", un roman très réussi également !!!
Le film fût une grosse déception comparé à l'oeuvre originale pour moi aussi, je le trouverai même raté si Nicholson n'avait pas sauvé les meubles, à coups de hache, hi hi hi :D
Bon, comme tu peux le constater, quand je parle du King, je ne m'arrête plus :D
Merci pour les tumultueux souvenirs ravivés !!! Ciao :)
J'ai vu que tu lisais Ça, Lupa et je me suis dit "oh trOp bien!" Je l'ai tellement aimée cette histoire. J'ai hâte de lire ton avis.
Pour avoir vécu diverses situations de "terreur" et m'en être tirée, je confirme qu'il peut y avoir cet effet grisant, comme un sentiment d'être "immortel". Mais il peut aussi y avoir le traumatisme qui suit la prise de conscience que l'on est tout à fait mortel ^^
Enfin avec les romans, se confronter à la peur ça permet de l'apprivoiser aussi. Mais n'empêche le palpitant est parfois soumis à rude épreuve :p
J'espère que je pourrai bientôt me dégager du temps pour Dr Sleep car je suis très curieuse de savoir comment Danny a grandi après ces évènements...
"sauvé les meubles à coups de hache" ahah, bien trouvé! :D
Clairement l'adaptation confrontée au livre, c'est de la daube... Je ne comprends même pas les choix de Kubrick tellement ils me paraissent distants de ce qui fait la force du roman. Bref.
Je crois que je vais me faire un challenge King en solo.
Et j'espère échanger sur Ça avec toi prochainement :)
Je suis ravie que tu aies apprécié ce livre. Il compte parmi ses meilleurs. Si tu souhaites poursuivre l'aventure King, je te conseille Différentes Saisons, un recueil de 4 longues nouvelles (novella dirait-on de nos jours :p). La nouvelle Le corps est un petit chef d'oeuvre, pas vraiment horrifique et pas du tout fantastique mais totalement géniale.
Pour ce qui concerne le film, Kubrick a fait de Shining ce qu'il voulait, ce que King lui a reproché. A tort à raison, ça reste leur affaire. Pour ma part je considère qu'une adaptation appartient à celui qui la scénarise et la réalise, il s'agit d'une vision d'une oeuvre par quelqu'un d'autre pas d'un copié-collé de l'oeuvre elle-même. Pour le meilleur et pour le pire. Bref, forcément si on juge Shining le film à l'aune de Shining forcément on va trouver ça mauvais mais il y a des tas de choses passionnantes dans ce film (qui a certes assez mal vieilli).
Hello :)
Oh ça oui, je compte bien poursuivre la découverte des oeuvres de Stephen King. D'une part parce que j'ai Dôme et La ligne verte dans ma PAL papier et d'autres en numérique. Par contre, tu me permets de découvrir ce recueil de nouvelles dont j'entends parler pour la 1ère fois. Et je t'en remercie +++ (le bonus des échanges entre blogueurs/lecteurs). :)
Je suis entièrement d'accord avec toi sur ce point "une adaptation appartient à celui qui la scénarise et la réalise, il s'agit d'une vision d'une oeuvre par quelqu'un d'autre pas d'un copié-collé de l’œuvre elle-même".
(dernièrement j'ai d'ailleurs adoré l'adaptation de Au revoir là haut, tout en prenant certaines libertés avec le roman, elle le sublime par le choix des acteurs, la mise en scène, etc).
Pour Shining de Kubrick, sans aucun doute, si j'avais vu le film sans avoir lu le roman de King, je l'aurais apprécié différemment. Ce que je "reproche" à Kubrick, c'est d'avoir annihiler la puissance des personnages de la mère et du gamin, le rôle de Nicholson est quant à lui divinement joué et dirigé. Reste ce parti-pris là du réalisateur qui me déçoit de ne pas avoir rendu leur intérêt au reste de la famille.
C'est vrai que je suis dure dans mon jugement et tu as raison de le souligner, mon avis sur le film se fait à l'aune de la forte impression que m'a fait le roman de King :)
Peut-être que je le regarderai à nouveau, à bonne distance de ma lecture pour y déceler ces choses passionnantes que toi tu as su voir :)
Merci de ton intervention, c'est toujours intéressant de confronter les avis. :)
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