Le Bâtard de Kosigan, T.2 Le fou prend le roi
16/10/2017
Par une nuit sans lune, Maître Kosigan perché sur un toit, tenait par la main une princesse... Les Goddams par l'odeur alléchés, faisaient à leurs oreilles siffler quelques flèches. Nul doute que dans un sombre guêpier notre homme était tombé.
1340, cité de Lens, Philip VI, roi de France, a maille à partir avec les anglais, sans compter un traître dans son giron. Notre Bâtard chevalier, lui, se croyait maître du jeu, las de nouvelles cartes ont été distribuées. S'il veut tirer son épingle du jeu et sauver ses fesses, il va falloir jouer serré et trouver qui ou quoi œuvre dans l'ombre.
Quant à son descendant, Kergaël de Kosigan, quelque part en 1899 les choses ont mal tourné. Le lien avec le passé se fait de moins en moins ténu, de plus en plus dangereux.
Je vais attaquer aussi fort que le début de ce 2ème tome, j'ai kiffé ma race à sa lecture.
Voilà ça veut dire ce que ça veut dire et si je veux l'exprimer de manière moins familière, je dirais que mon plaisir fût total.
Dans Le fou prend le roi, il n'est pas possible de suivre le Bâtard de Kosigan et sa troupe sans mouiller le maillot. Ce gars vous fait suer sang et eau avec lui. D'ailleurs, amis et ennemis sont nombreux dans ce tome 2 à rester sur le carreau. Côtoyer le bonhomme c'est pour le moins qu'on puisse dire, à ses risques et périls. D'ailleurs, lui même perd un peu de cette superbe qui avait pu en agacer certains dans le tome 1, la figure du chevalier sans peur et sans reproche croisé dans L'ombre du pouvoir se craquelle un peu. Quand une force supérieure agit, sous les traits d'une antique magie, c'est la vie qui s'enfuit ou presque...
Si dans le précédent tome, le côté fantasy était présent il restait toutefois léger, et l'on avait plus eu le sentiment d'être dans un james bond like sauce récit de chevalerie (très plaisant ceci dit). Ici, magie, sorts et autres maléfices sont de la partie ainsi que de nombreux êtres appartenant au corpus du genre (elfes noirs, striantes, dragons et autres vouivres). L'ambiance n'en est que plus sulfureuse et inquiétante. De quoi vous river aux pages, le souffle court.
Fabien Ceruttti se montre intelligent, il réussit à ne pas forcer le trait de son personnage principal, le donne à voir sous un autre angle, moins super héros, plus à même de griller ses 9 vies de chat, mais toujours charmeur, gouailleur et nimbé d'un certain mystère, bien plus humain aussi dans ce qu'il exprime par rapport aux membres de son équipe. Il n'est jamais un chef dénué de sentiments, méprisants la vie de ses hommes, bien au contraire.
L'intérêt des lecteurs pour les personnages secondaires étant manifeste, l'auteur a bien compris la curiosité que ceux-ci ont su suscité dans le 1er opus (eh eh essayez de le dire le plus vite possible). La demande était là, Cerutti y a répondu. Ainsi, c'est avec plaisir que l'on découvre Dun la Changesang et le jeune Eldric investis, à des degrés divers, de certaines missions de hautes volées. Rôles qui mettent un peu plus en lumière leurs personnalités, forces et faiblesses. Janvier, Toaille et Cinq-mai ne sont pas en reste pour autant et les émotions sont au rendez-vous.
Les évènements de 1899 quant à eux se montrent de plus en plus intrigants, passionnants. Kergaël de Kosigan ayant eu quelques soucis, ce sont ses amis Charles Chevais Deighton et Léopold Delisle qui se retrouvent à devoir faire la lumière sur les sombres incidents de Maulnes. Petit à petit, alors que le mystère s'épaissit autour de ceux qui en ont après Kergaël de Kosigan (et les trésors légués par son ancêtre), l'Histoire de la guerre de Cent ans (comme l'avait été celle de la succession du Comté de Champagne précédemment), et le monde d'antan tel qu'il était connu jusque-là par nos historiens, se trouvent remis en question par les chroniques de Pierre Cordwain de Kosigan, dit le Bâtard. Faut-il y croire? Pour y répondre, les recherches ne peuvent s'arrêter là, quels que soient les dangers encourus.
Il faut saluer ici le travail d'alternance entre le récit premier (conduit tambour bâtant) et le récit secondaire (plus posé mais dont la forme épistolaire lui sied à merveille). D'abord parce que leur succession se fait de manière très lisse, sans que le rythme du premier n'en pâtisse, que le second apparaisse fade. L'équilibre est juste.
Ensuite, parce que le second répond au premier et même le prolonge par de petits clins d’œil qui ouvrent la voie à une Histoire revisitée, prétendument possible et à laquelle on croit sans effort.
C'est sans doute là qu'est pour moi la part d'imaginaire la plus importante du roman de Fabien Cerutti, nous amener à croire que dans le passé, il fut un temps où des êtres fantastiques et des forces magiques intervenaient dans le monde des humains et en étaient parties prenantes. Et que si ce n'était l'intervention de l’Église catholique, ce monde-là ne se serait pas éteint. Ça fait rêver.
De même lier à l'intrigue les recherches du Bâtard de Kosigan sur ses propres origines ne peut qu'éveiller l'intérêt du lecteur. Ici aussi la lumière se fait petit à petit, quelques pistes s'ouvrent, certaines laissant même planer le doute sur ce que l'avenir réserve à notre mercenaire, voire sur ses choix futurs.
Je me dis que le titre du 1er tome, "l'ombre du pouvoir" aurait tout aussi bien pu convenir à cette suite tant il y est question ici aussi de jeux de pouvoir mettant en présence des forces obscures, œuvrant à l'insu des plus grands du Royaume. Un pouvoir tout ce qu'il y a de plus sombre, inquiétant et dont le Bâtard de Kosigan y serait prétendument lié.
Il y aurait beaucoup à dire encore, mais rien qui n'ait déjà été dit par tous ceux qui ont déjà livrés leurs avis. Ce ne serait ici que redites.
Il me suffit de dire que Le fou prend le roi est une très bonne suite, qui ne perd rien en intensité, ne s'essouffle pas, qui au contraire tient le lecteur en haleine, bien éveillé et prompt à se jeter sur le tome 3.
"Quel que soit le lieu, la religion ou l'époque , on dirait bien que les hommes ont le don de pervertir le divin pour justifier leurs plus basses besognes."
"L'âme humaine est imprégnée d'égoïsme et les rares personnes qui affirment ne pas connaitre ce sentiment se trompent généralement elles-même. Leur précieuse loyauté, leur merveilleuse bonté ne valent que par la reconnaissance qu'elles peuvent en tirer, laquelle leur procure plaisir, satisfaction et fierté."
"aucun enjeu n'aura jamais davantage de valeur que celui de sa propre vie."
Merci aux Editions Folio et notamment au Club Folio SF.
(lecture comptant aussi pour le Challenge de Licorne - ma n°3)
15 commentaires
Tu le sais déjà ; il est dans mes prévisions printanières 2018 !
Je me dis que décidément, cette saga a de nombreux atouts dans sa manche : Un héros aux visages multiples, des personnages intéressants, davantage de magie, l'alternance d'un récit maîtrisé, une intrigue qui tient la route...
N'en jette plus, la cour de ma curiosité déborde déjà !!!
Merci pour cette 2ème rencontre fort éclairante avec ce Bâtard ;-)
Aaaaah merci ma Lupa pour ton com. Il vient apporter un peu de vie à ce billet qui se morfondait de solitude ;p
Ce qu'il y a de bien avec cette série c'est que tu as à la fois la continuité et la nouveauté entre et à chaque tome.
Continuité car le fil conducteur est là par rapport à l'histoire personnelle de Kosigan et Kergael ; novateur parce que chaque tome est une nouvelle aventure.
Je pense, et espère ne pas me tromper, que tu t'amuserais fort à la lecture de Le Bâtard de Kosigan.
Merci encore de ton petit mot :)
Bon tu as "kiffé ta race" alors... ^^
A te lire j'ai l'impression que l'auteur s'inspire des critiques de ses fans pour réorienter sa suite (les personnages secondaires, les attitudes moins héroïques du chevalier...)
Ces univers légèrement décalés dont tu parles tu les retrouves chez Bordage que tu connais bien avec l'Enjomineur où l'esprit des lumières est accusé de détruire la magie du monde. Je n'aime pas le conservatisme de Bordage (sa vision déplorable et partiale de la Révolution est digne d'un Stéphane Bern du bocage) mais son roman est bon bien que très long. Chez Kay aussi. Mais mais mais tu m'influences là je vais finir par tenter de lire ce roman en trois tomes *_^ .
Oui Fredd ^^ Je sais ce n'est pas très joli et soutenu comme expression mais, je la trouvais pertinente par rapport au plaisir ressenti. Elle veut dire ce qu'elle veut dire :p
Je ne sais pas ce qu'il en est des intentions et attentions de l'auteur par rapport aux critiques reçues, s'il en tient réellement compte ou si pour lui le schéma "personnages", histoire suit son cours tel qu'initialement prévus.
Je connais fort peu Bordage tu sais? Je n'ai lu qu'un titre du monsieur. Alors je serais bien en peine d'aller dans ton sens ou de contredire ton avis tranché sur lui :) Ceci dit, je n'oublie pas et garder en tête cela pour voir si je suis d'accord avec ça ("digne d'un S.Bern du bocage" : excellent par ailleurs comme image. Vraie je ne puis le dire :p ).
Kay aussi est conservateur? Ma foi, puisque je compte découvrir bientôt quelques uns de ses romans, je verrai ce qu'il en est.
Mais mais mais tu sais que présentés comme ça, tu freines presque mon envie de les lire! ;)
Allez avoue que tu es curieux de te confronter à ce Bâtard de Kosigan.
(merci du commentaire)
Je me suis mal exprimé je voulais dire que Kay aimait bien aussi installer ses intrigues dans des mondes en transition comme le livre dont tu parles. Des civilisations bousculées par l'irruption d'un nouveau pouvoir ou d'une nouvelle foi. Les thèmes humanistes généralement développés me rendent le personnage assez sympathique et j'ai hâte de le "rencontrer". Il faut lire du Kay, c'est très bon dans le genre ! La mosaïque de Sarance est une bonne saga, comme Les Lions. Je t'imagine déjà me glissant malicieusement que c'est une saga de plusieurs tomes et que je ne faisais pas tant le difficile.
Ce qui me dérangeait dans L'enjomineur c'est la charge sans subtilité du vendéen Bordage contre la Révolution française qu'il assimile aux horreurs de la guerre civile de Vendée. Cela m'a irrité mais c'est très en vogue hélas. Mais Bordage écrit bien.
J'avoue en effet une certaine curiosité ahahaha malgré la faible influence que tu revendiques ^^
D'accord Fredd. Merci d'avoir éclairci les choses :) De toute façon, je lirai Kay et très certainement Les lion d'Al Rassan (suis jamais sûre du titre et de son orthographe...). Et les mondes en transition j'aime!
On me dit de te glisser malicieusement quelque chose à l'oreille : "Hey mais dis donc toi, il y a un certain nombre de tomes pour chacune de ces sagas!!! mmpf je vois que tu ne faisais pas tant ton difficile à l'époque de leur lecture..." ^^
hihi
A propos de Bordage, dans Ceux qui sauront (une uchronie), il est aussi question de Révolution française. Elle a échoué d'ailleurs. Et les nantis ont les privilèges de l'accès au Savoir... La révolte gronde et quand des hommes et des femmes marchent sur Paris, la répression "policière" fait mal.
Je ne connais rien de la guerre civile Vendéenne... :/ Je ne savais même pas que Bordage était vendéen... Il aurait donc un parti pris?
La guerre de Vendée est certainement u des épisodes les plus noirs de la Révolution française après la constitution civile du clergé, les déboires du roi et le début de la guerre contre les monarchies d'Europe. On oublie souvent que se furent les monarchistes catholiques vendéens qui provoquèrent les premiers massacres de Républicains mais la riposte de la toute jeune République fut féroce et massive. Surtout que la République était militairement en situation difficile sur ses frontières. Les fameuses colonnes infernales ravagèrent la Vendée. Bordage a évidemment un parti pris et surtout mélange un peu tout. Mais ce serait long et ennuyeux à détailler.
En parlant longuement avec un responsable et maintenant ami de la médiathèque il m'a glissé que je connaissais tout de même bien le genre. Mes fautes de jeunesse lool ^^. Je m'y remets doucement avec une exigence dans la qualité de l'écriture et de la réflexion. Je veux qu'un roman de l'imaginaire m'apporte quelque chose dans les émotions ou dans la réflexion.
Je voudrais avoir plus de temps encore pour pouvoir me pencher sur tout ça, les épisodes marquants de notre Histoire...
Long peut-être, ennuyeux je ne crois pas...
En tout cas, tu sembles t'y connaître en Histoire!
Ces exigences dont tu parles il me semble que je les aies quel que soit le genre que je lis. Et parfois, j'accepte qu'un roman, au même titre qu'un film, ne soit que pur divertissement (et là je revois un peu les-dites exigences). Cela repose et permet de faire aussi des découvertes sympathiques...
j'ai adoré ta première expression. Bizarrement il me fait pensé a la saga de Robin Hobb ou je suis a coté de mes pompes?? ça a l'air pas mal en tout cas. Je vais me le noter
Merci de ton appréciation Chris :)
C'est quand même différent. Plus adulte, un côté "saligaud" (pour pas dire autre chose) au personnage principal. Fitz est un gentil à côté.
Et une part historique (uchronie) que n'a pas la saga de Robin Hobb.
Mais note note car c'est vraiment sympa :)
J'ai pris bien plaisir à lire ce tome également, et j'espère qu'on en apprendra plus dans le 3e !
Je ne connaissais pas§ Bon c'est le tome deux, alors je vais noter le tome un pour commencer peut-être! ;) *Anne*
Salut Zina
J'ai vu ça oui ^^
Nous en apprenons déjà pas mal même si l'auteur maintient notre intérêt en ne divulguant pas tout. "petit à petit l'oiseau fait son nid" :)
Hello par ici ! Content de t'avoir vu aux Utos :)
J'ai cette saga dans ma PAL, il faut que je l'en sorte enfin...
:)
Oui sympathique rencontre. D'autant plus que tu es du coin ^^
Tu as sûrement dû voir qu'au-delà mon simple avis, c'est une saga qui a du succès. A voir si cela se confirme pour toi.
(je l'espère!)
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