Le Cycle de Syffe - T.3 Les chiens et la charrue - Patrick K. Dewdney
09/10/2021
Les derniers évènements ont laissé Syffe au bord d'un gouffre sans fond, esseulé.
Un loqueteux aspirant à la mort.
Une contrebandière dealant sur les eaux de la Brune lui tend la main et contre toute attente, il la saisie.
C'est qu'on lui fait miroiter un périple jusqu'en terre brunoise, pays de son enfance.
En chemin, les choses se compliquent, faisant craindre le pire.
Nouveau sursaut, un atout inespéré et voilà les cartes à nouveau rebattues.
Ce troisième tome signe l'entrée de Syffe dans l'âge adulte. Il lui faut faire le deuil de l'enfance, des êtres qui l'ont porté jusque-là et de ce(ux) qui, pensait-il, donnerai(en)t un sens à sa vie.
Renoncer ou renaître, se laisser porter ou prendre sa destinée en main, c'est sans doute ce qui se joue dans la première partie du récit et ce qui suit.
Syffe est en lutte avec ses démons habituels, il se bat la coulpe avec une certaine complaisance masochiste. Et s'il avance, c'est avant tout parce qu'il est porté par ses nouveaux compagnons, L'Ecailleuse et son acolyte taiseux. Chemin faisant, une union se forge basée sur l'entraide, l'effort et la confiance. Cela remet le jeune homme un peu d'aplomb, le sort de son marasme, lui ouvre une nouvelle voie.
Mais que serait un tome du Cycle de Syffe sans une énième péripétie qui le conduit si ce n'est sous terre, au moins aux portes de l'enfer.
Et que serait un tome du Cycle de Syffe sans un énième tour de manche, sans cette acuité du héros qui lui permet de tirer le meilleur parti d'une situation où tout semblait perdu.
Et donc voici un allié, puissant parmi les puissants, venu du passé, redevable, qui donne à notre jeune héros un nouveau statut, le met en position d'être enfin véritablement maître de son destin. Et s'il se plaît à le croire, nous aussi.
C'est un plaisir certain de retrouver Syffe, même quand il lutte intensément contre l'obscurité qui l'englouti. On pourrait râler de le voir ainsi s'apitoyer sur lui-même, ressasser ses actes passés, et ce à répétition. Mais il faut bien que chemin du deuil se fasse, il faut bien grandir et renoncer à ce qui n'est plus et ne sera jamais. Alors on reste dans les pas du garçon, qu'il trébuche ou se relève.
Et on ne doute pas qu'il saura se redresser de toute sa hauteur. Et prendre encore plus d'ampleur. En on savoure. Tant que ça durera.
Les chiens et la charrue est un tome férocement politique avec de grands enjeux de territoires, de guerre et paix.
Et si Syffe se fait pièce maîtresse volontaire entre les mains de ses nouveaux alliés, il reste maître de lui-même et de la voie qu'il se trace.
Et quand bien même il ne mène pas la danse, il sait se faire entendre, en imposer. Dorénavant, il ne marche plus seul.
Que dire d'autre si ce n'est que la ribambelle de personnages mis en scène dans ce tome m'a encore une fois ravie. Des nouveaux venus aux visages cabossés par les épreuves, une courageuse et intrépide figure, une autre mystérieuse et diablement charismatique, des hommes fourbes ou rusés, compagnons d'un jour ou toujours, amante ou amie d'une vie et d'autres encore, puissants ou petits. Tous.tes là à raison.
Un tome qui a su au fur et à mesure de sa progression trouver un nouveau souffle, celui de la bataille, de l'affrontement. Et que cela est appréciable après tant de pages contemplatives ou ancrées à décrire ce qui est, qui se subit, qui se vit, mais aussi ce qui lacère l'esprit.
Oui, il y a toujours dans l'écriture de Dewdney, ce souci du détail, exacerbé. Tout est cadré au millimètre, de l'herbe jusqu'aux cieux.
Aussi l'action est heureuse quand elle arrive. Je me languissais de ce ton plus guerrier, moins posé, plus incisif et vibrant du danger, suspendu au trait d'une arbalète, aux coups d'estoc, aux corps qui tombent, exhalent un dernier souffle.
Enfin se rendre compte, arrivée à la fin qu'on n'est pas au bout de ses surprises. Réaliser que le monde des puissants est avant tout le monde des dupes.
Et se dire qu'on en redemande.
"Je n’avais pas de compagnon ou de famille, personne pour venir lui demander des comptes ou lui faire des ennuis s’il me fêlait les côtes, et il le savait. Je n’étais personne."
"Certains jours, le destin fourche. Lorsqu'on a la chance de le voir, il faut savoir l'accepter."
Merci aux Editions Au diable Vauvert qui en partenariat avec les Editions Folio m'ont permis de poursuivre ma découverte de cette saga fantasy créée par Patrick K. Dewdney.
2 commentaires
Tu en parles très bien, chronique limite poétique ^^
:) Et ben ça fait plaisir à lire (surtout quand tu te sens moyennement satisfaite de ce que tu as écrit). Alors MERCI !
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