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23/10/2012

L'enfant-rien - Nathalie Hug

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Mon nom est personne

"Je suis un enfant-rien, avec un père-néant, une mère-tas-de-fraises-à-la-crème et je peux disparaître.

Je m'appelle Adrien. Dans Adrien, il y a rien."

Ce livre est une pensée, une voix, un cri de douleur, celle d'Adrien. Un cri d'amour sans retour. Une voix qui hurle sa tristesse, son désarroi, sa colère, sa rage de ne pas exister aux yeux d'autrui, aux yeux de cette mère qui ne s'anime que lorsqu'elle reçoit la visite de sa demi-soeur et de son père rien qu'à elle. Un cri étouffé ou lâché lorsqu'il comprend que cet homme auprès de qui il quémande un amour filial, jamais, jamais cet homme ne le regardera comme un fils potentiel. La seule chose qu'Adrien gagnera en retour de cette affection débordante qu'il veut offrir ce sont des gifles et d'être encore plus rejeté. Alors Adrien hurle sa souffrance, sa solitude, il hurle son incompréhension de ce monde d'adulte qui le néglige, l'oublie, qui fait de lui un enfant-rien :

"Je n'en peux plus d'être seul, attaché à cette chaise. Mais que font-ils? Pourquoi m'oublient-ils? Pourquoi m'ont-ils chassés des bras de Catherine? Maman! Maman! Maman! Je crie, je hurle à m'en déchirer la gorge, le désespoir, la colère puis la haine me remplissent et ma poitrine se gonfle d'envies de massacre. Je me balance sur cette chaise dont le bois envahit mes chairs, je crie mais personne ne vient, personne ne m'entend et la chaise m'aspire dans son trou noir. Cette saleté va m'engloutir tout entier."

Histoire bouleversante, sans pathos pourtant, que celle de cet enfant qui ne demande qu'une chose : avoir un père, connaître l'identité de ce dernier et qui croit que sa mère enferme ce secret dans une boîte rouge qu'il ne peut atteindre. Encore une fois, on se rend compte à quel point les non-dits peuvent bouleverser la vie d'un enfant. Certes, il y a dans ce livre un vrai drame, celui de l'enfance brisée par le silence et l'ignorance des adultes mais il y a aussi de grands moments de tendresse. Adrien est un petit garçon qui adore malgré tout cette maman toute cassée, qui est tout ce qui lui reste au final alors, il la protège contre les médisances de tatie Barrettes. Et sa mère on comprendra au final tout l'amour qu'elle voue à ce petit garçon au travers de ses larmes et de l'impuissance dans laquelle elle se trouve. Adrien, c'est un petit bonhomme que l'on voudrait prendre dans ses bras et serrer très fort, à l'en étouffer.

Le talent de Nathalie Hug ne consiste pas seulement à rendre l'existence et la souffrance de cet enfant palpable mais d'avoir concocté une fin, une chute qui nous laisse sur le carreau, dubitatif et de s'exclamer "hein? attends il faut que je relise ça... Oh punaise!" Une fin qui surprend, une fin à la "6ème sens" pour ceux qui s'en souviennent.