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23/12/2015

Aqua™ - Jean-Marc Ligny

aqua tm,jean marc ligny,la guerre de l'eau,burkina faso,un monde comme ça en 2030 c'est pas si loin...,géopolitique et stratégie,réchauffement climatique,l'eau vaut de l'or,ça m'a donné soif n'empêche!Au fil de l'eau

2030. La Terre est en partie sous les flots, en partie asséchée et elle subit de violentes perturbations climatiques. La société est de son côté plus que branlante sur ses fondements. Les riches, adeptes de toutes les dérives permises par l'argent, le pouvoir et les fanatismes de tous bords vivent dans des enclaves surprotégées. A l'extérieur, la violence et la pauvreté sont devenues extrêmes.
Dans ce chaos, une nappe phréatique africaine nouvellement découverte devient l'objet d'une convoitise qui voit des individus se lier ou s'affronter sans pitié, les uns pour le bien d'un pays et du peuple qui se meurt, les autres pour leurs propres intérêts financiers et/ou personnels.


Au Pays-Bas, suite à un acte terroriste, une digue cède dévastant tout sur son passage. Rudy ayant tout perdu obtient le statut de reco (réfugié écologique) et part pour l'Allemagne. Là, dans un camp, il doit sa survie à un "engagement" dans un survival commando aux idées nazis qu'il ne partage pas et dont il parviendra finalement à s'enfuir.

A St Malo, Laurie s'ennuie et croupie dans l'humidité de la ville et la maison inondée de ses parents. Membre de l'ONG SaveOurSelves, la jeune femme est sollicitée pour convoyer du matériel de forage à destination du Burkina Faso. Elle y voit là un signe, une occasion de fuir la pluie et sa misère intérieure.

A Eudora, enclave étatsunienne, la famille Füller enterre son fils aîné. Anthony le père, PDG de la multinationale Resourcing, loin d'être affligé par cette perte, enverrait bien promener sa femme Jessica et  son plus jeune fils, Tony, atteint d'une forme de progéria, pour se consacrer à ses affaires. Surtout qu'il vient d'être informé qu'en tant que propriétaire de GeoWatch, exploitant du satellite qui a débusqué la nappe phréatique au Burkina Faso, celle-ci lui reviendrait de droit. Et quand le bonhomme rencontre un écueil tel que le TCI, il change juste son fusil d'épaule avant de le réarmer pour se lancer dans la bataille.

Au Burkina Faso, pays le plus pauvre d'entre les pauvres, Mme la présidente Fatimata Konaté a pris connaissance, grâce à un hacker, de cette nappe phréatique qui pourrait redonner pour 50 ans de l'eau à son pays et sauver ce qu'il reste de sa population d'une mort certaine. Elle sait que l'ONG SOS va lui fournir le matériel d'exploitation, mais elle sait aussi qu'elle va devoir se battre contre le patron de Resourcing qui veut s'accaparer cette eau inespérée.

Tous vont converger vers le même point d'eau...

Voici les bases de cette histoire qui en font à la fois un roman SF d'anticipation, un roman d'aventure, une sorte de road-trip, une critique politique et sociale et pour finir un récit fantastique.
950 pages qui se lisent aisément parce qu'un style entraînant, parce que des chapitres courts qui impriment un rythme nerveux. La narration avec plusieurs fils est bien tenue, bien maîtrisée, plutôt passionnante. C'est vraiment avec plaisir que je plongeais dès que je pouvais dans ce roman.
L'auteur dit avoir fait un gros travail de recherches pour ce roman écrit sur plusieurs années. Je veux bien le croire tant il est riche et ambitieux par les thèmes abordés, mais aussi par la belle palette de personnages qu'il nous sert.
Je me suis attachée à Rudy, j'ai particulièrement apprécié la figure emblématique de Madame la présidente du Burkina Faso et j'ai profondément exécré un certain nombre d'autres personnages.

Jean-Marc Ligny nous livre un roman profond, réfléchi, sans concession vis à vis de la politique des plus riches (les fameuses multinationales ww), leur libéralisme économique et leur main-mise sur les richesses des pays pauvres et ce sans contreparties. Il pointe du doigt les intérêts de certaines pays qui font prévaloir l'argent sur l'humain, surtout si cet humain est situé dans un pays africain soi-disant sous-développé.
Je ne m'y connais guère en géopolitique (ni même en stratégie politique) pour dire si cette vision que nous donne à voir Ligny est par trop simpliste, en tout cas, elle fait l'objet d'une belle analyse. Cela apporte sans nul doute profondeur et crédibilité à cette histoire.
L'engagement écologique de l'auteur est clairement ressenti, ses préoccupations sur la question du réchauffement climatique et du manque d'eau à venir (ou déjà bien présent dans certains pays), aussi. Il ne manque pas non plus de pointer du doigt les addictions médicinales (surconsommation de psychotropes et/ou autres boosters, pour ne citer qu'eux), les fanatismes qu'ils soient religieux ou communautaires et même ai-je relevé en tout début de roman, la manipulation médiatique.

Presque tout est bon dans ce roman. Je dis presque car certaines choses m'ont dérangée et notamment dans ce qui à trait au sexe. Que l'auteur ait pris le parti de faire de Fuller une ordure de première en nous le présentant de la manière la plus odieuse qui soit dans diverses scènes bien trash, passe encore, on peut se dire que c'est pour poser le personnage (même si pour le coup, on tombe un peu trop dans la caricature).
Mais quand il répète avec insistance que tel stylo est "phallique", quand il fait jouir la femme de Fuller au travers d'une vision de la scène de viol de la gouvernante (bah oui hein forcément!), quand la première relation entre deux des protagonistes de l'histoire tourne au porno (oups c'est parti tout seul)... j'avoue que je finis par me poser des questions sur l'intérêt de cette débauche sexuelle dans l'histoire.
A ceux qui me répondraient que c'est pour montrer la décadence de la société (patin couffin) je réponds non, pas d'accord. Pas d'accord quand c'est l'image de la femme qui en prend un coup. Bref.

Si le côté fantastique de l'histoire ne m'a pas particulièrement dérangé (dans le contexte africain et ses pratiques, le bangré (magie ancestrale) est bien inséré au cœur du récit et sert plutôt bien l'intrigue), je n'ai à contrario pas trouvé la romance particulièrement intéressante, ni même la manière dont le Bien et le Mal s'affronte (pas été très réceptive à cela). Le dénouement en pâti d'ailleurs un peu.
M'enfin, sur 950 pages, je vous assure que ça ne suffit pas à gâcher l'intérêt de cette lecture et je ne peux que vous conseiller Aqua™.

"-A vous de décider, ma chère : un Coca offert par le Gouvernement ou un massacre au nom de la sacro-sainte égalité? [...]
-Autrement dit, reprend Fatimata, acceptez-vous enfin notre hospitalité ou préférez-vous camper sur vos principes, certes généreux mais présentement inapplicables?"

"-L'Europe n'est pas le paradis que tu crois. Les gens comme nous y sont plutôt mal vus... Les gens de couleur, je veux dire.
-C'est quand même un pays riche, où il y a de l'eau à profusion, où tout le monde mange à sa faim.
-Détrompe-toi! Il y a des riches, d'accord, même des très riches, mais ils sont peu nombreux et vivent entre eux dans des enclaves où tu n'as pas le droit d'entrer. Il y a la majorité qui se débrouille plus décemment malgré les coupures d'eau et d'électricité, malgré les tempêtes, les sécheresses ou les inondations qui sont toujours des catastrophes là-bas, à croire qu'ils n'y sont pas habitués. Et puis il y en a plein qui n'ont rien, pas de travail, pas d'argent, pas de logement, qui vivent dans la rue ou dans des camps sinistres et dangereux, qui mendient ou se mettent en bandes pour voler... Pour eux c'est même pire qu'ici, parce que ici, si t'es pauvre, tout le monde est pauvre autour de toi, tu n'est pas tenté. Mais là-bas, t'es pauvre et tu vois toute cette richesse brillante, ces magasins luxueux, ces bagnoles rutilantes qui roulent à l'hydrogène, ces hypermarchés qui regorgent de bouffe, gardés par des vigiles armés... Tu vois tout ça et tu baves, t'as la haine qui te ronge l'estomac. Et quand t'es noir comme nous, ou étranger en tout cas, et que tu viens faire des études, ces gens-là croient que tu leur voles le travail qu'ils n'ont pas, que tu te fais du fric sur leur dos. Alors ils déchargent leur haine sur toi parce qu'ils ne peuvent pas atteindre les responsables qui vivent dans les enclaves. Tu vois, c'est comme ça l'Europe."

Je remercie les Editions Folio pour ce partenariat  et de me renouveler leur confiance.

Commentaires

Décidément... l'evocation des scènes de sexe dans ce bouquin m'enlève toute envie de l'ouvrir, malgré le bien que tu en dis par ailleurs.

Et puis, sur le fond, je me demande s'il ne serait pas possible et plus économique d'exploiter l'eau des régions où il y en a trop plutôt que d'aller puiser dans les nappes. Mais je n'y connais pas grand chose. ;-)

Écrit par : solessor | 23/12/2015

Je ne connais pas du tout, mais le sujet et la façon de le traiter me font de l’œil!
Et, je te remercie de souligner ces scènes de sexe, je trouve ça pénible aussi que ce soit toujours (ou presque) l'image de la femme qui soit dégradée! Bon, je n'ai pas lu ce livre, mais on le trouve suffisamment ailleurs pour te comprendre, malheureusement!

Écrit par : Black Siren | 23/12/2015

Le TM est-il important à ce point ?!

Écrit par : Alex-Mot-à-Mots | 23/12/2015

Il ma tardait de lire ta chronique car vois-tu j'ai discuté un peu de ce livre avec la vendeuse qui travaille aux éditions Atalante, (librairie et maison d'édition à Nantes, j'adore cette boutique ! ) Bref, le peu qu'elle m'a dit m'a donné "l'aqua" à la bouche, mais pas de budget … et puis en lisant ta chronique, je ne ressens plus le besoin de me l'approprier absolument…Avec ce que tu me racontes, j'ai un peu peur de m'ennuyer et de soupirer, et c'est pas un petit pavé en plus ! Non, je passe mon tour sur ce récit. bises ma C'era

Écrit par : Licorne | 23/12/2015

OMG ce com, Alex, tu t'es lâchée...

Écrit par : Soundandfury | 23/12/2015

Comme toi, quelques défauts trouvés à ce roman, mais cela reste un très bon moment de lecture, avec ces 950 pages qui défilent sans qu'on s'en rendent compte. Et aussi une vraie interrogation sur notre société, au vu de l'actualité qui trouve un terrible écho dans ce roman.

Écrit par : La chèvre grise | 24/12/2015

Hé hé, j'ai l'impression que tu as été raccord avec la COP21 dis donc ! Serait-ce elle qui t'a inspiré ce pavé dans la mare ? Non, blague à part, je l'avais déjà repéré celui-là, mais depuis de l'eau a coulé sous les ponts, comme toujours ^^ Je vais sans doute me plonger dedans un jour ou l'autre, et je reviendrai en parler avec toi après, promis ;-) Baci !!!

Écrit par : Lupa | 27/12/2015

Sol : elles ne font heureusement pas tout le roman, sinon ce titre serait dans la catégorie SM que SF ^^
Beaucoup d'eau ne veut pas nécessairement dire potable, exploitable...

Black Siren : hey toi, ça y est tu arrives à nouveau à commenter ici :) Le sujet est vraiment intéressant. Je n'hésite pas du tout à le conseiller malgré les bémols. Tente-le et tu m'en reparleras ^^

Alex : je n'sais pas M'dame. J'y vois un distinguo d'avec le précédent Aqua du même auteur, mais il y a peut-être plus...

Licorne : alors si ce qui te fait peur, c'est de t'ennuyer avec ce bon pavé, sur ce point je te rassure complètement, il n'est absolument pas ennuyeux. Vraiment. Les chapitres sont courts et du coup, ça imprime vraiment un bon rythme à la lecture.
C'est assez intense et nerveux. Peut-être à la toute toute fin, un certain ralentissement mais pas de quoi faire bâiller aux corneilles.
Au pire, si tu ne veux pas investir, je peux te l'envoyer.

Sound : il faut bien qu'elle le fasse ici puisque chez toi elle ne peut...

La chèvre grise : oui ça défile plutôt vite effectivement et pas d'ennui du tout. Plutôt agréable dans le style. Il est clair que ce qu'on lit dans ses pages est complètement raccord avec notre actualité. Je faisais d'ailleurs la réflexion hier soir en voyant les infos : d'un côté, des tornades, de l'autre des incendies, ailleurs des inondations... On est dedans et ça craint!

Lupa : Oui, coïncidences ^^ mais non pas à cause de la COP21, le partenariat Folio était lancé bien avant ^^ Mais peut-être eux l'avaient-ils mis dans la sélection en prévision de la COP21 (???)
J'attends de pied ferme et toute ouïe que tu viennes m'en reparler! Gaffe, je te prends au mot :)
Baci in ritorno.

Écrit par : c'era una volta | 29/12/2015

Je ne suis pas sure de le lire, mais comme je te l'avait dit, j'adore ta photo de présentation!

Écrit par : Mariejuliet | 05/02/2016

MJ : :) Merci! Si jamais un jour tu le lis, reviens m'en parler.

Écrit par : c'era una volta | 17/02/2016

Les commentaires sont fermés.