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22/08/2012

Les Faux-Monnayeurs - André Gide

les faux-monnayeurs,gide,amitiés et plus si affinités entre garçons,exhubérance,écrivain en manque d'inspiration,edouard et tutti quanti,pdérastieL'âge "déraison"...
"Sincérité et confusion des sentiments. Gide propose une conception de l'amitié comme idéal de formation qui reste bien pédérastique et tributaire de la relation amoureuse. Initiant, éduquant, l'amitié gidienne mêle le plaisir des sens aux plaisirs de l'esprit." - Stephan Ferrari


Tout est dit...

"Journal d'Edouard - 18 octobre.
"Laura ne semble pas se douter de sa puissance ; pour moi qui pénètre dans le secret de mon coeur, je sais bien que jusqu'à ce jour, je n'ai pas écrit une ligne qu'elle n'ait indirectement inspirée. Près de moi, je la sens enfantine encore, et toute l'habileté de mon discours, je ne la dois qu'à mon désir constant de l'instruire, de la convaincre, de la séduire. Je ne vois rien, je n'entends rien, sans penser aussitôt : qu'en dirait-elle? J'abandonne mon émotion et ne connais plus que la sienne. Il me paraît même que si elle n'était pas là pour me préciser, ma propre personnalité s'éperdrait en contours trop vagues ; je ne me rassemble et ne me définis qu'autour d'elle. Par quelle illusion ai-je pu croire jusqu'à ce jour que je la façonnais à ma ressemblance? Tandis qu'au contraire c'est moi qui me pliais à la sienne ; et je ne le remarquais pas ! Ou plutôt : par un étrange croisement d'influences amoureuses, nos deux êtres, réciproquement, se déformaient. Involontairement, inconsciemment, chacun des deux êtres qui s'aiment se façonne à cette idole qu'il contemple dans le coeur de l'autre... Quiconque aime vraiment renonce à la sincérité. [...] "Que cette question de la sincérité est irritante! Sincérité ! Quand j'en parle, je ne songe qu'à sa sincérité à elle. Si je me retourne vers moi, je cesse de comprendre ce que ce mot veut dire. Je ne suis jamais que ce que je crois que je suis  - et cela varie sans cesse, de sorte que souvent, si je n'étais là pour les accointer, mon être du matin ne reconnaîtrait pas celui du soir. Rien ne saurait être plus différent de moi, que moi-même. Ce n'est que dans la solitude que parfois le substrat m'apparaît et que j'atteins à une certaine continuité foncière ; mais alors il me semble que ma vie s'alentit, s'arrête et que je vais proprement cesser d'être. Mon coeur ne bat que par sympathie ; je ne vis que par autrui ; par procuration, pourrais-je dire, par épousailles, et je ne me sens jamais vivre plus intensément que quand je m'échappe à moi-même pour devenir n'importe qui.
"Cette force anti-égoïste de décentralisation est telle qu'elle volatilise en moi le sens de la propriété. Un tel être n'est pas de ceux qu'on épouse. Comment faire comprendre cela à Laura?"


Edouard se connaît bien, il sait qu'on n'est jamais tant sincère que lorqu'on est seul face à soi-même et, qu'à partir du moment où l'on aime et où l'on veut briller aux yeux de l'autre, tout n'est que faux-semblants, apparats. J'ai personnellement le sentiment que l'on pourrait dans ce passage remplacer le nom de Laura par celui d'Olivier, ou par n'importe quel autre nom de garçon qui serait susceptible d'attiser sa curiosité, viendrait sublimer son être.


Edouard se nourrit des autres pour vibrer (Laura fut un temps, Olivier maintenant), pour donner un sens "honorable" à sa vie (Bernard, le vieux La Pérouse, Boris), pour écrire son roman "les faux monnayeurs" (Georges et sa "contrebande" de fausse monnaie, Olivier encore).


L'homosexualité qui se devine est initiatique : Edouard pour Olivier. La pédérastie se lit dans le sens étymologique grec : Edouard pour Bernard. Ou encore, l'attrait pour les jeunes garçons : Edouard pour Georges voir pour Caloub le jeune frère de Bernard vers qui, en fin de roman, il semble vouloir porter son attention "Je suis bien curieux de connaître Caloub". L'homosexualité ou la pédérastie prennent aussi forme sous les traits détestables du Comte de Passavant, moins reconnues, plus pernicieuses.


L'amitié flirte avec cela.


Gide est magistrale dans ce roman pour nous décrire - par le biais d'un narrateur que jamais nous ne parvenons à identifier - les sentiments, la fascination qui s'exerce, les ratés générés par les silences gênés, par la trop grande envie d'épater, de plaire que ce soit à un ami ou à l'être aimé.


Bref...


Je n'avais gardé de ma 1ère lecture (vers 19/20 ans) qu'un vague souvenir du contenu de ce roman, l'histoire d'une très forte amitié entre Olivier et Bernard. De la relation entre Edouard et Olivier, non. Des noms oui. J'avais la conviction de l'avoir beaucoup aimé et le voir ressurgir entre les mains d'une amie m'a donné l'envie de le relire.


Je pensais que je sortirais tout aussi exaltée de cette relecture, mais pas vraiment. C'est en en discutant donc avec cette amie qui l'avait elle-même fraîchement lu que j'ai compris pourquoi. A l'époque, qu'avais-je pu éprouver d'autre que cette adéquation de sentiments contrariants et contrariés que nos personnages éprouvent, que cette exubérance de la jeunesse qui s'emporte et qui porte en elle malgré tout un front soucieux.


Oh je ne me sens pas vieille, loin de là ^^ Mais, aujourd'hui, je poserais à l'instar d'Edouard, un regard amusé, tendre, curieux et inquiet à la fois sur nos protagonistes.


Dans Les faux-monnayeurs, on est à un âge où l'on se prend au sérieux, où tout n'est ressenti que pleinement, où briller aux yeux des autres, d'un ou d'une en particulier importe tellement, au point parfois de fausser ce que l'on est, de nous éloigner plus que de nous rapprocher.


Mais que faire de ces regards à l'envie s'ils ne nous apportent pas la reconnaissance, s'ils ne nous font pas briller aux yeux de qui l'on voudrait? Alors la vie, les amis sincères sont là pour nous signifier que paraître ne vaut rien, que ce qui importe c'est d'être soi-même encore un peu enfant, pas tout à fait adulte et rester indulgents toujours les uns envers les autres.


Olivier à Bernard - "Nous avons, à notre âge, une fâcheuse tendance à juger les gens trop sévèrement et à condamner sans appel. Bien des actes nous apparaissent répréhensibles, odieux même, simplement parce que nous n'en pénétrons pas suffisamment les motifs."


Une lecture appartenant au genre classique qu'il est bon d'avoir lu...

04/08/2012

Le vieux qui ne voulait pas fêter son anniversaire – Jonas Jonasson

Le Vieux_Jonas Jonasson.jpgVive la T.N.T. ! Quand badaboum rime avec épopée…

Il y a l’histoire

Allan Karlsson est en maison de retraite, il va avoir 100 ans et alors que tout le gratin de la ville se déplace pour fêter son anniversaire, il se fait la belle en chaussons par la fenêtre de sa chambre. Il rit déjà de la tête que fera Sœur Alice, cette sorcière qui le prive de son ultime plaisir, l’alcool.

Allan à la gare rencontre un jeune homme qui lui demande de surveiller sa valise. Il accepte mais son bus est sur le point de partir alors ni une ni deux, il embarque la valise et part. Mal lui en a pris cette valise appartient à un gang qui n’a pas l’intention de lui abandonner la valise et son contenu…

S’en suit une fuite en avant ou notre papi entraînant avec lui dans son « échappée belle » diverses personnes (et un éléphant !) passe du statut de fugueur à celui de voleur puis meurtrier. Tout ceci sans que cela ne semble le perturber plus que ça. Et en effet, Allan Karlson en a vu d’autres et s’est sorti de bien plus mauvais pas…

La fin de cette « aventure » est truculente. Je ris encore un peu de l’esprit malicieux avec lequel lui et ses compagnons se sont joués du procureur.

…Et l’Histoire

Un siècle de vie ! La biographie d’Allan Karlsson n’est autre qu’une histoire dans l’Histoire. Un homme simple, généreux, sans éducation, un brin naïf mais loin d’être stupide. Un gars qui apprend à manier les explosifs un peu trop bien, qui passe par la case prison après un malheureux accident et, lui qui hait la politique, finit par fréquenter les plus grands de ce monde dans une course à la bombe nucléaire dont il semble être le seul à connaître la formule.

Tour à tour, artificier, alchimiste, touriste, prisonnier, évadé, espion aux 4 coins du monde. Ce papi qui a eu une vie entre Mc Gyver et Forrest Gump, une vie extraordinaire n’en garde pas moins une vision simpliste : il n’aspire en définitive qu’à une chose, siroter de l’alcool sous un parasol au soleil… On comprend mieux qu’il n’ait pas eu envie de finir sa vie dans une maison de retraite.

 

Sa lecture achevée, je suis pourtant restée perplexe, ne sachant dire si j’avais véritablement aimé ce roman. Et je ne saurais dire pourquoi j’avais hâte de le finir… Peut-être cela tient simplement au fait que j’étais encore trop imprégnée de ma précédente lecture ? Je crois que j’ai apprécié le personnage d’Allan Karlsson, sa faculté à influer sur la vie d’autrui, sa vision somme toute optimiste de la vie sans me sentir fondamentalement transportée par l’histoire.

Quant aux péripéties d’Allan Karlsson peu importe qu’elles soient complètement loufoques, elles n’en restent pas moins plaisantes, souvent drôles. Et elles ont au moins le mérite de nous refaire vivre quelques grands moments d’Histoire de manière cocasse.

Pour les amateurs d’humour noir, d’histoire/Histoire fantaisiste, d’histoire qui se termine bien…