03/12/2012
Autobiographie d'une courgette - Gilles Paris
Une Courgette c'est gratiné!
Icare 9 ans, surnommé Courgette, vit tout seul avec sa maman invalide et alcoolique. Une maman qui parle à la télé et distribue les coups sans plus aucune raison. Une maman qui dit que du ciel pleuvent les malheurs. Alors Icare trouve un pistolet et décide de tuer le ciel. Il le rate mais pas sa mère en colère. Courgette est alors placé dans un foyer pour enfants orphelins ou abandonnés pour divers motifs. Dans ce lieu, il va nouer ses premières vraies amitiés entre pitreries et instants plus graves et, surtout, y apporter un optimisme à toute épreuve.
Autobiographie d'une courgette c'est une petite pépite. Ou le grave côtoie le léger, les "brimades" la tendresse, les larmes le rire. Un roman plein de candeur, de mots, de regards d'enfants qui se posent sur leur quotidien et sur le monde des adultes qu'ils côtoient. Et dans la bouche de notre petit narrateur ou des autres enfants, il y a des questionnements, des remarques qui sonnent très justes, qui émeuvent ou qui au détour d'une réplique de Courgette provoquent un rire franc :
"-Tous les hommes ont la tête dans les nuages.
Qu'ils y restent donc, comme ton abruti de père qui est parti faire le tour du monde avec une poule.
Des fois, maman dit n'importe quoi. J'étais trop petit quand mon papa est parti, mais je vois pas pourquoi il aurait emmené une poule au voisin pour faire le tour du monde avec."
"Je m'appelle madame Papineau, dit la dame aux cheveux blancs. Mais tu peux m'appeler Geneviève [...] C'est marrant tous ces gens qui veulent qu'on les appelle par leur prénom alors qu'on les connaît pas".
"Tout est un jeu, monsieur Raymond.
-Raymond, ma petite, il ne faut pas croire que la vie est un jeu. Qui t'a dit une chose pareille?
-Personne, c'est moi toute seule, pour me protéger de la sorcière qui voulait que je l'appelle Nicole et après elle était méchante. Quand je frottais le parquet, si je me disais que tout ça n'était qu'un jeu, alors j'avais moins mal."
Gilles Paris aborde dans son livre un thème certes grave, celui de la maltraitance aux enfants, de leur vie en institution, mais jamais il ne sombre dans le pathos. Bien au contraire, en donnant la parole à Courgette il fait de son roman, un livre où le sourire ne nous quitte presque jamais. Courgette c'est une bouffée d'oxygène et un vrai rayon de soleil dans un ciel couvert. Je parle de Courgette oui, mais comment ne pas citer ses camarades d'infortune (Camille, Simon, Ahmed, les frères Boris et Antoine...) qui sont autant de raisons de sourire et d'aimer ce livre. Quelques figures adultes (Raymond, Rosy, Ferdinand le cuisinier, Mme Papineau...) nous amènent aussi leur lot de bons sentiments, gentillesse et compassion qui réussissent à nous réconcilier avec cette nature humaine capable du pire et parfois du meilleur.
Les enfants nous délivrent une sacrée belle leçon d'amitié et de solidarité, "l'union fait la force"! oui avec eux on le comprend et j'en souris encore ; mais j'ai le coeur aussi serré de cette fin qui est certes entendue mais que j'aurais voulu encore plus belle pour chacun d'eux... Inutile de vous dire que j'ai pleuré?
Un livre qui se lit tout seul, une écriture simple mais pas simpliste, des mots d'enfants qui percutent, des personnages drôlement attachants, des attitudes d'adultes qui touchent ou qui font grincer des dents, de l'émotion en veux-tu en voilà, voilà la recette de cette Autobiographie d'une courgette. Et attention hein, défense de dire j'aime pas sans avoir goûté! :)
Allez quelques extraits bonus pour vous mettre l'eau à la bouche :
"C'est pas parce qu'on demande rien qu'on sait tout."
"Et les grandes personnes c'est pareil.
C'est plein de points d'interrogation sans réponses parce que tout ça reste enfermé dans la tête sans jamais sortir par la bouche. Après, ça se lit sur les visages toutes ces questions jamais posées et c'est que du malheur ou de la tristesse.
Les rides, c'est rien qu'une boîte à questions pas posées qui s'est remplie avec le temps qui s'en va."
21:35 Publié dans Bang | Tags : autobiographie d'une courgette, g.paris, maltraitance, foyer pour enfants, courgette c'est pas un légume mais quand ça l'est on peut en fai | Lien permanent | Commentaires (9)
01/12/2012
30 Days Book Challenge
30 DBC #23 à 30
30 DBC #30 : Et demain que lirai-je?
Une place à prendre de J.K. Rowling. Parce que je me suis promis de le lire avant la fin de l'année et qu'il me tend les bras depuis un bon bout de temps ^^. Et aussi parce que je me suis engagée à le prêter rapidement :) Et aussi parce que je suis curieuse de me faire mon opinion sur ce que la maman d'Harry Potter nous a concocté, même si je sais qu'il s'agit d'un roman plus sérieux, mature, etc...
30 DBC #29 : Un auteur que j'évite de lire, que je déteste.
Amélie Nothomb. Alors je ne peux pas dire que je déteste mais par contre, je n'arrive pas du tout à aller au-delà de ce personnage qu'elle incarne et donc à lire ses livres. Je sais que c'est un à-priori stupide qui ne tiendrait probablement pas longtemps à la lecture d'un de ces romans mais voilà, pour l'instant, j'en suis là. Il ne tient qu'à vous de me convaincre de ma bêtise ^^
30 DBC #28 : Un livre addictif, que je n'ai pas réussi à lâcher, jour comme nuit?
Ce monde de ténèbres de Frank E.Peretti. Flash-back années Fac. Roman prêté par Philip D. (un pote de fac) et qui m'avait tenu réveillée toute une nuit. Y avait pas moyen que je le lâche avant d'en avoir lu la dernière ligne. Une histoire de combat entre le Bien et le Mal dans la petite ville d'Ashton.
30 DBC #27 : La plus belle couverture dans votre bibliothèque?
Soie d'Alessandro Baricco. J'ai flashé sur cette couverture et ce beau livre à la librairie G*** où il figurait sur un présentoir. Je lui ai tourné autour puis m'en suis saisi, l'ai feuilleté puis reposé et finalement j'ai craqué, je l'ai ramené à la maison. Pas encore lu, peut-être une lecture de fin de mois...
30 DBC #26 : Aimerais-je écrire un livre? A quel sujet?
Aaaah LA question! Y a des férus de lecture qui n'aimeraient pas écrire une histoire? J'y pense parfois, souvent. Encore plus maintenant que je participe à divers ateliers écriture (Atelier écriture de Denis Azoulay à La ligue contre le cancer du Rhône, atelier écriture en ligne Skriban mais chut là bas je suis anonyme :p). Sur quel sujet? Aucune idée précise ou trop au contraire... Affaire à suivre ou pas ^^
30 DBC #25 : Autobiographie-biographie préférée ?
Le livre de la vie de Martin Gray. Après Au nom de tous les miens que j'avais aussi beaucoup apprécié, l'auteur nous a signé dans ce livre une histoire bouleversante, tragique et belle où malgré les drames vécus, malgré tout ce qui pouvait le pousser à vouloir rejoindre les siens dans la mort, la vie pourtant est bien là. Leçon de courage, d'humilité, d'espoir aussi ("ce qui ne me tue pas, me rend plus fort" pourrait résumer la vie de Martin Gray)
30 DBC #24 : Quel type de lectrice suis-je? (sujet vaste – ouvert)
Qui aime à se laisser emporter par ce livre qu'elle tient entre les mains, s'évader et vivre une histoire au travers de ses personnages. J'aime vivre l'histoire et j'aime être en adéquation avec le ou les personnages du roman (suivant l'histoire hein ^^). Je suis une lectrice qui aime sortir d'un livre en ayant ressenti plein plein d'émotions et en être encore toute imprégnée.
30 DBC #23 : Mon Roman d’amour préféré ?
Les oiseaux se cachent pour mourir de Colleen McCullough. Dans le genre grande histoire d'amour qui porte en elle tout ce qu'il faut d'attente, d'espoir, désespoir, accomplissement et regrets on peut peut-être faire mieux mais cette relation entre Maggie Cleary et le Père Ralph de Bricassart, ahlala lala lala... J'ai lu le roman, vu et revu le téléfilm. Bref, je crois que j'étais un peu amoureuse moi aussi du Prêtre (oh eh l'acteur était pas mal :p)
13:22 | Tags : 30 days book challenge, questions 23 à 30 | Lien permanent | Commentaires (6)
30/11/2012
Se retenir aux brindilles - Sébastien Fritsch
Sur mes traces...
Ariane Vermus, la trentaine bien sonnée, ses 2 enfants en bas âge sous le bras sonne à la porte de Marthe et Noël Aride. Elle ne les a pas revus depuis une vingtaine d'années. Elle ne sait même pas ce qui l'attend derrière la porte, si sa soudaine arrivée, sans prévenir, lui vaudra un bon accueil, mais a-t-elle le choix? Non, elle est en fuite. Ainsi commence ce roman Se retenir aux brindilles. Des interrogations sur le présent, sur le futur que se pose Ariane et qui trouveront peut-être leur réponse en ce lieu de son enfance et dans les souvenirs qui remontent à la surface. La narratrice nous entraîne avec elle dans un "presque road-movie" -de la Dombes de son enfance en passant par Lyon, ville de ses 1ers pas de femme "libre", suivi d'une ultime échappée belle sur Nantes en quête d'un ami/amour perdu- sa course s'achèvera sur un retour à la case départ : Lille qui l'accueillera métamorphosée et la boucle sera enfin bouclée.
Il y a des histoires comme ça qui vous enferrent dans une ambiance dont vous ne pouvez sortir qu'une fois le livre fermé (et encore, je dis ça mais je suis encore toute imprégnée moi de ce roman et des émotions qui m'ont traversée). Oui, je crois que j'ai été saisie toute entière par les souvenirs d'Ariane, par son passé comme son présent, par les émotions qui l'ont traversée et qui sont parvenues jusqu'à moi.
Immersion totale dans la peau de l'enfant soumise aux jeux interdits et si pervers de son ami Tristan (mentor et maître de l'horreur). J'ai souri à cette amitié "innocente", à l'image de cette petite fille toute dévouée à ce premier ami et à cet autre compagnon de jeu, Matthias (dans l'ombre de Tristan toujours...). L'émotion m'a saisie encore et encore dans ce lien si profond et, si fragile à la fois, qui la reliait à Marthe Aride, la maman gâteau qu'Ariane n'a pas goûté enfant et qui, on le comprend avec tristesse, souffre de la maladie d'Alzheimer. J'ai souri à ces soubresauts de femme révoltée et fermé les yeux sur les doutes qui l'accompagnaient... tout en ayant envie de lui dire "allez, allez s'il te plaît ne laisse pas tomber". J'ai grincé des dents en comprenant enfin certaines choses de son passé et de la femme qui en était née. J'ai été émue un peu de ses ratés amoureux, de ses rendez-vous manqués qui auraient pu faire que tout soit différent pour elle, alors oui j'ai été entraînée comme elle à certains regrets. Enfin, j'ai frémi de peur et de rage à ce danger en elle, autour d'elle, après elle...
Des questions je m'en suis posées, autant sinon plus qu'Ariane elle-même. Et il m'aura fallu être patiente pour obtenir les réponses. Il m'aura fallu refaire le chemin à l'envers avec elle. J'ai été tenue en haleine oui par ses/ces questions et, si parfois, je me doutais de certaines choses, j'ai apprécié que les réponses ne soient pas venues tout de suite, qu'il ait fallu prendre le temps qu'il fallait, celui du travail de mémoire, celui du travail patient de l'assemblage des pièces d'un puzzle, celui qui se trouve aussi dans les questions amenées au détour d'une rencontre que l'on croit anodine. J'ai accepté en rongeant mon frein les silences, les non-dits et ma patience a été récompensée. Même quand je me suis agacée de certaines choses qui me semblaient "invraisemblables", qui soulevaient des "tiens mais pourquoi elle fait ça?", j'ai obtenu une explication dont j'ai pu me satisfaire ; preuve est que l'auteur n'a rien laissé au hasard.
A maintes reprises aussi je me suis fait la réflexion que Sébastien Fritsch s'y connaissait drôlement bien en psychologie féminine pour rendre aussi bien la pensée, les doutes, les vibrations du coeur d'Ariane. Parce que ce personnage sonne terriblement juste dans ce qu'elle vit, dans ses souvenirs et ses émotions. Et si d'aventure vous aimez Radiohead ou Marillion, groupes qui ont accompagné Ariane dans son évolution, pourquoi ne pas accompagner votre lecture de ces morceaux choisis pour encore mieux être au diapason de ses émotions.
Et si pour saluer la plume de l'auteur je vous laissais avec quelques extraits que j'ai aimé?
"En l'absence de toute réelle discussion avec les trois adultes qui composaient mon entourage immédiat, je n'avais donc pas d'autres solutions que de garder toutes mes questions pour Tristan. Avec ses deux ans de plus que moi et sa brillante intelligence, il avait, à coup sûr, toutes les réponses.[...]
Pourquoi le chat des soeurs Montorfano, il est couché dans le caniveau sur la place de l'église?
-Parce qu'il est mort.
-Et pourquoi il gonfle?
-Pour pouvoir s'envoler vers le paradis des chats.
Et effectivement, deux jours plus tard, il avait disparu. En ne le voyant plus au bord du trottoir, j'avais levé les yeux par réflexe. Et j'avais pu en tirer deux conclusions : le Paradis était vraiment très loin, puisque je n'arrivais plus à voir le chat ; le clocher des églises était pointu dans le seul but de montrer à tous les félins la direction de la terre promise. Et j'avais continué ainsi mes interrogations d'enfant :
Pourquoi tes parents te laissent faire tout ce que tu veux?
-Parce que c'est moi le chef. Ils ne sont là que pour me servir.
-Pourquoi les soeurs Montorfano veulent toujours jouer avec nous?
-Parce qu'elles s'ennuient. Tu imagines, toi, passer tout ton temps entre filles?" (p.71-72)
"Et de toute façon, on est tous comme ça, nous les humains : à dix ans, on vit dans le rêve, à vingt, dans l'illusion, à trente, dans les projets et à quarante, dans les regrets. Et à chaque fois, on oublie simplement de vivre la réalité." (p.192)
"Les paroles de Constance me remettent en mémoire cette phrase de Mattias : on se laisse impressionner par les montagnes que la vie nous oblige à gravir, mais si l'on se contentait de s'intéresser uniquement à la petite pierre posée au sol devant nous, on se rendrait compte, en posant le pied dessus, qu'on est déjà lancé dans l'ascension." (p.211)
"Mais j'ai beau remonter pas à pas dans ma mémoire les sept années que je viens de vivre avec celui que j'ai choisi pour mari, je ne retrouve pas le moment où "tout donner" s'est transformé en "tout céder", "tout recevoir" en "tout accepter", puis "tout accepter" en "ne rien refuser"." (p.269)
A cette interrogation laissée par l'auteur en dédicace : "Fuir ou rester? Avancer ou revenir? Abandonner ou se retenir aux brindilles", je crois qu'une réponse est apportée. Si cette question vous titille alors n'hésitez pas à lire ce beau roman pour y répondre :)
Je remercie Livraddict et M. Sébastien Fritsch & Editions Fin mars, début avril - 2012 pour ce 1er partenariat qui m'a ravie.