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06/05/2013

Affinités - Sarah Waters

Affinités,Sarah Waters,prison pour femmes,époque victorienne,spiritisme,déceler le vrai du faux,amours contrariésQuel est son double?

Margaret Prior, jeune demoiselle de la bourgeoisie anglaise, décide de devenir Dame Patronnesse à la prison pour femmes de Milbank. Elle compte ainsi fuir son quotidien et le mal de vivre dans lequel l'ont entraînée la mort de son père et un amour contrarié. Elle se jette donc, contre l'avis de sa mère qui la sait fragile, à corps perdu dans cette fonction à valeur sociale et découvre non sans effroi la misère de l'endroit et la dureté des conditions d'enfermement de ces femmes. Si certaines l'émeuvent, une en particulier va éveiller en elle un intérêt et un désir particulier, entre fascination et attirance : Selina Dawes, jeune spirite, condamnée pour escroquerie.
Entre emprise psychologique et séduction, il faudra à Margaret trouver son chemin jusqu'à la vérité.

Voici une histoire somme toute assez fascinante, qui plonge le lecteur au coeur d'une ambiance bien sombre et à l'intrigue savamment menée.
D'abord parce que le gros de "l'action" se situe dans un milieu carcéral féminin qui, même s'il peut rebuter par sa dureté, que c'est sordide et que ça donne froid dans le dos, donne aussi une vision extrêmement intéressante d'un tel lieu à cette époque.
Ensuite parce que toute l'histoire repose sur des personnages féminins dont l'une si mystérieuse, inquiétante mais fascinante et, l'autre, si fragile et rebelle à la fois. En tout cas, deux femmes "hors normes" qui vont se trouver... par hasard pense-t-on dans un lieu tout aussi atypique.
Il ne faut pas pour autant oublier ces autres visages dans et hors de la prison qui nous interpellent et suscitent sympathie ou rejet et font aussi le paysage d'Affinités.

Sarah Waters sait y faire pour attiser la curiosité du lecteur et ce n'est pas pour rien que le roman s'ouvre sur la scène qui conduira Selina Dawes en prison. Toutefois, l'explication à tout ceci, il faudra attendre d'être arrivé au bout de l'histoire pour supposer comprendre ce qui s'est produit. Les passages du journal de la jeune spirite distillés à l'intérieur du récit de Margaret Prior viendront d'ailleurs de plus en plus éveiller notre intérêt pour le personnage. Servent-ils l'intrigue pour autant? Ils contribuent sans nul doute à faire grandir la curiosité du lecteur pour le côté occulte du roman. Ils rendent celui-ci avide de savoir qui est réellement Selina Dawes. Est-elle crédible, manipulatrice ou simplement folle? Ils contribuent en tout cas à la fascination du personnage et permettent sans doute de comprendre pourquoi Margaret Prior est tant attirée par la médium. Mais sans cette fragilité qui la caractérise aurait-ce pu être différent? Sans cette passion trouble révélée à demi-mots qu'elle a vécu par le passé, qui la blesse encore, se serait-elle réfugiée dans l'oubli que lui procurait sa relation "spirituo-fusionnelle" avec Selina? Au final, qui de Margaret ou de Selina sauvait l'autre de de ses fantômes et d'une condition "misérable"?

Bien que j'ai flairé de loin ce qui allait advenir, je n'en ai pas moins voulu croire à un dernier rebondissement qui ferait que... tout en me disant qu'au fond, c'était presque obligé qu'il en soit ainsi. Mais quand même, il n'en reste pas moins que toute la vérité n'est pas faite sur Selina Dawes et, que là, il appartient à chaque lecteur d'interpréter le journal de la médium à sa façon et suivant ses propres croyances. De même, le lecteur ne pourra s'empêcher de se questionner sur les ressentis de Margaret Prior. Souvent plongé dans un brouillard tout aussi épais que son esprit abymé dans la drogue qu'on lui fait prendre puis qu'elle ira chercher, on ne cessera de se demander si ce qu'elle vit dans le secret de sa chambre est du lard ou du cochon...

" Je n’ai jamais eu peur comme en ce moment. On m’a laissée dans le noir, avec rien que la lumière de la rue pour écrire."

Affinités comprend de nombreuses ficelles pour séduire son lecteur : ambiance carcérale victorienne sordide, suspens et frissons, romance sous-jacente, drame, personnages intrigants, semi-vérités et faux-semblants, dissimulation... J'ai apprécié chaque moment de cette lecture et quand je lis que ce roman n'est pas le meilleur de Sarah Waters, je me réjouis alors de découvrir les autres!

01/05/2013

Boys don't cry - Malorie Blackman

boys don't cry,malorie blackman,mono-parentalité précoce,un enfant ça vous prend aux tripes,homosexualité,homophobie,2 papas et un tonton,le père n'est pas homo3 hommes et un couffin

Un jeune homme aux portes de la majorité, tout juste diplômé et prêt à prendre son envol loin d'une famille qu'il aime mais qui lui pèse. Son ambition, ses rêves semblent réduits à néant ce jour où son ex-petite amie, disparue dans la nature, réapparaît et lui laisse sur les bras leur bébé, Emma. Choqué, Dante saura-t-il prendre la bonne décision pour lui et le bébé? Pourra-t-il compter sur sa famille composée d'un frère plus jeune qui se bat de son côté contre l'homophobie et, d'un père qui élève déjà tout seul ses fils en portant sur eux les ambitions qu'il n'a pas lui-même réalisées?

Boys don't cry est un roman jeunesse qui se lit d'une traite et facilement parce qu'un style simple, des chapitres courts, alternants entre les narrations de Dante et celles plus concises d'Adam. Ce n'est pas larmoyant et, contrairement à ce que j'ai pu lire parfois, je trouve l'ensemble plutôt crédible.
On pourrait le croire léger de fait ce roman alors qu'il aborde des sujets qui entrent sans doute dans des préoccupations qui sont peut-être plus de l'ordre des parents que des jeunes ados. Eux, en général ils vivent d'abord les choses et se posent souvent les questions après ^^
Rapports sexuels non protégés, enfantement non voulu, parentalité précoce, père célibataire, assumer ses responsabilités ou déléguer?
L'attirance pour le même sexe à l'adolescence n'est-elle qu'un passage ou une homosexualité vraie et assumée? L'homophobie s'exerce-t-elle uniquement à l'extérieur? Les moqueries et dénis familiaux sont-il à considérer comme des actes d'homophobie, une forme de pression invitant à rentrer dans le rang?
Devient-on parent à la naissance de son enfant? Peut-on aimer et assumer un enfant non désiré sans conséquence future sur l'enfant? L'arrivée d'un enfant resserre-t-elle la cellule familiale ou la fait-elle exploser?
Un homme est-il moins apte qu'une femme à élever un enfant? Aime-t-il moins bien qu'une mère?
Modèle parental, modèle sexuel... Quelle place la société laisse-t-elle à ce qui sort de la norme?

Ces thèmes abordés font-ils de Boys don't cry un roman moralisateur et/ou ennuyeux?
Absolument pas! C'est un roman vivant, intéressant qui parle d'une histoire, celle d'hommes qui s'ouvrent à des sentiments, à la possibilité de ressentir et d'exprimer un amour qui se veut à la base maternel et, par là, démonstratif. Ce n'est d'ailleurs peut-être pas pour rien que celui qui se montre d'emblée le plus réceptif au bébé, le plus tactile, est Adam. Il est homosexuel et n'a pas honte de laisser voir sa part de féminité, de câliner Emma.
Histoire d'hommes qui vont apprendre grâce à la présence d'une petite fille à s'ouvrir les uns aux autres, à crever les abcès et tensions familiales. Histoire d'amour, de courage, de force de caractère. Apprendre à rebondir malgré les aléas de la vie. Apprendre à se serrer les coudes dans l'adversité. Savoir se remettre en question. Savoir ravaler sa colère et pardonner : à soi, aux autres. Être fier d'être ce qu'on est.
Apprendre à pleurer sans honte même si on est un homme.

Voilà ce que j'ai vu dans Boys don't cry. Voilà ce qui m'a plu. Dante, Adam, deux frères aussi attachants l'un que l'autre, que je me suis bien gardée de juger. Je me suis juste laissée porter par le tourbillon des sentiments, des pensées qui les traversaient ; tantôt mer tourmentée, tantôt mer apaisée. Le père aussi, qui voit en son fils aîné, son propre passé le rattraper et qui va aider Dante à rester droit, et lui transmettre son savoir, qui va apprendre à les écouter aussi.
Les autres protagonistes de l'histoire ne laissent pas sans réaction. Mais je ne vais pas tout vous dévoiler, je préfère que vous lisiez ce roman. Que vous puissiez l'apprécier autant que moi si possible!

J'ai failli oublier! Merci Stéphanie de m'avoir donné le prétexte du challenge Livr@deux pour sortir ce titre intéressant de ma PALN :)

Quelques citations :

"Parfois, les choses que nous sommes convaincus de ne pas vouloir sont en fait celles dont nous avions le plus besoin."

"Les enfants, c'était bien quand on avait la trentaine bien entamée, un emprunt pour sa maison, un boulot stable et des économies à la banque. Les enfants, c'était pour ces gens sans envergure qui n'avaient rien d'autre pour remplir leur vie."

"- J'ai récemment découvert quelque chose, ai-je reparti sans chercher à arrêter les larmes qui coulaient sur mes joues. Les garçons ne pleurent pas, mais les hommes oui."

"- J'aime la vérité, je crois. Il faut que certaines personnes s'assurent qu'elle soit dite."

27/04/2013

Tobie Lolness - Timothée de Fombelle

Tobie lolness,Timothée de Fombelle,petit homme mais une grande âme,manichéisme,arbre de vie,tolérance,écologie,amitiésLe monstre du Lolness

Tobie Lolness, c'est l'histoire d'un monde de tout petits hommes - à vue d'oeil environ 2 mm - qui vivent dans un arbre. Ca c'est ce qu'on apprend au bout d'un certain nombre de pages, car l'histoire de fond est celle de la traque et/ou de la fuite d'un enfant poursuivit par son peuple. Récit à rebours qui explique le pourquoi du comment de cette échappée belle et plus encore.

Bon, ça fait un moment que j'ai lu ce roman alors il me faut farfouiller dans les méandres de mon esprit qui a vécu beaucoup de choses depuis, et lu aussi pas mal d'autres choses aussi... En même temps, comme je ne suis pas encore frappée d'Alzheimer, y a des chances que je m'en sorte non? Vous me direz ça à la fin ^^

J'ai aimé :

- Le personnage de Tobie Lolness qui donne tout son sens à l'expression "on a parfois besoin d'un plus petit que soi", même si c'est difficile de faire plus petit que ce peuple-là... Il incarne le courage, la fidélité en amitiés, le don de soi, la compassion aussi. Petit homme intéressant pour lequel on se prend à trembler, pour qui on espère une belle issue...
- Le fait que cette histoire nous invite à réfléchir sur les comportements humains, que ce soit envers les siens ou en regard de la nature. Ce petit microcosme amène ceux qui ne l'ont pas encore fait à ouvrir les yeux sur ce qui se passe dans nos sociétés. Référence notamment au monde des promoteurs immobiliers dévoreurs de ces espaces naturels qui sont pourtant nécessaires à la vie de certains peuples et à la Vie tout court.
- L'histoire du peuple des Pelès, peuple rejeté et craint à tort. Ce que découvrira Tobie. Là, il est question d'un racisme viscéral, sans véritable raison, simplement basé sur l'ignorance de l'autre... Métaphore de cette peur de l'étranger que l'on rencontre bien souvent dans notre monde (y a un peu des Na'vis non dans ce peuple des Pelès? *Na'vis, peuple autochtone de Pandora dans Avatar).
- Cette relation très particulière entre Tobie et Elisha qui sera source de divers rebondissements et surprises.
- Les illustrations de François Place qui sont pertinentes et mettent bien en relief certaines parties du récit. Elles permettent aussi de se faire une idée de ces petits hommes, histoire de ne pas les associer pour ceux qui connaissent aux mini pouces :P

J'ai moins aimé :

- Le côté un peu trop manichéen. J'aurai peut-être apprécié un peu plus de nuances entre le Bien et le Mal, même si un ou deux personnages sont teintés de cette ambivalence, surtout au contact de Tobie. Mais bon, en même temps c'est un titre jeunesse et c'est peut-être plus approprié au message que souhaitait faire passer Timothée de Fombelle. Oui, il fallait peut-être ça pour que le lecteur ne se laisse pas aller à minimiser les faits perpétrés par les vilains du roman.
- Avoir dû attendre "longtemps" avant de savoir pourquoi Tobie était en fuite et ainsi traqué par les siens, ça a imprimé à l'histoire un rythme un peu trop lent par moment. Mais ça c'est mineur et surtout lié à mon impatience de savoir comment tout ça allait se "finir".
Et puis, je n'aime pas quand j'ai le sentiment que l'auteur ficelle son lecteur à l'histoire "juste" parce qu'il lui manque des éléments nécessaires à la compréhension de l'intrigue. Mais je pousse un peu loin hein si je dis ça? Stop! ne me jetez pas de tomates j'arrête et je reconnais que ce n'est pas forcément ce que l'auteur a voulu.

En définitive :

Tobie Lolness est un roman jeunesse d'apprentissage qui saura plaire aux jeunes publics mais aussi aux adultes. On y trouve un récit relativement original, profondément humain, un monde très fourni et diversifié. Une aventure poétique qui n'empêche pas la réflexion sur des thèmes d'actualité tel que l'environnement/l'écologie, le racisme/la peur de l'étranger, le totalitarisme, les relations humaines/l'amitié...
Que ces thèmes nous parlent ou pas, nul doute que Timothée de Fombelle aura su conquérir par son écriture bon nombre de lecteurs.
Je suis quand même un peu curieuse de lire le 2ème et dernier tome de cette histoire, Tobie Lolness-Les yeux d'Elisha, et voir ce qu'il advient de notre jeune héros et des autres protagonistes...

"Les mots sont des combattants de l'ombre. Si on choisit de devenir leurs amis, ils nous aident toute la vie. Sinon, ils se mettent en travers de notre chemin."